EXPOSITION POP’AIR, L’EXPOSITION GONFLÉE : PROMESSE TENUE ?
Laurent Desjars
6/17/20223 min read
Au cours de ma carrière, j’ai parfois utilisé des objet gonflables, du ballon logotypé à l’arche publicitaire… En découvrant la promesse d'une expérience immersive inédite au cœur de l’œuvre d’une vingtaine d’artistes, je prends deux entrées pour l'exposition Pop Air. Cela fait quelques temps que je ne suis pas allé dans la Halles Charlie Parker. Total 40 euros.
Je me dis que c’est un investissement. Et je suis intrigué : comment attirer et retenir tant de gens avec des ballons ? Sur les cinq mille mètres carrés de l’exposition, je vais bien découvrir une œuvre qui va m’accrocher l’esprit, faire frémir mon imagination, me traverser de fulgurances et me mettre sur la piste d’un concept imparable. L’affiche est séduisante. Colorée comme un fil d’Almodovar. Enigmatique et attirante.
Il y a un monde fou ce dimanche. Même s’il fait beau et que les pelouses du parc de la Villette sont couvertes de familles, de joueurs de foot, d’amoureux et d’adolescents oisifs. La queue est longue comme le Pont des Arts. Il y a des cris d’enfants. Ma femme émet des doutes sur l’intérêt de l’exposition, comme elle le fait depuis le début, et moi, je lui montre de nouveau l’affiche comme un label rouge sur le dos d’un poulet sous cellophane. Des enfants se lamentent, il fait chaud, je trouve l’affiche un peu moins belle, tout à coup.
Le premier contact avec l’expo, ce sont ces grandes œuvres des studios ENESS qui vous séduisent par leurs couleurs de cartoon et que l’on identifie comme des poissons et des méduses si l’on se concentre un peu. Nous pénétrons ensuite dans une piscine, ou ce qui ressemble à une piscine, l’œuvre d’un collectif italien « Italian Quiet Ensemble ». Sous des nuages sur lesquels d’étranges éclairs sont projetés, dans une ambiance sonore non moins étrange, les enfants crient. On les a autorisés à sauter dans le grand bain, à plonger sous les milliers de boules en plastique souple. Les gens crient comme dans une piscine. Les artistes ont-ils atteint leur objectif ou souffrent-ils en silence de voir leur œuvre investie par le public de l’Aquaboulevard ?
Nous sortons rapidement. Je ne suis pas venu à la piscine et encore moins dans un célèbre magasin de meubles, sans les meubles. Nous traversons un couloir sinueux et découvrons, au-dessus de nos têtes, des taureaux magnifiques, dont il émane une force incroyable malgré le fait qu’il ne s’agisse que d’une sculpture en papier de soie. Je suis conquis mais ma femme me fait remarquer que c’est un peu mince, d’autant que les cris nous rattrapent, ou plutôt nous rattrapons les cris.
Nous débouchons sur une sorte de kermesse. Des imitations d’œuvres célèbres sont accrochés sur les murs d’une enfilade de stands. On se bouscule pour faire des selfies devant une Joconde en ballons.
Après : c’est le néant. Un néant subjectif puisqu’il s’agit de mon néant. Puis, c’est une course vers la sortie et quelques coups d’œil amusés, distraits à des guirlandes de boules se reflétant dans un miroir et un nœud gigantesque que l’on nous empêche formellement de toucher.
De nouveaux les taureaux. En entier cette fois. J’aime ces taureaux. Majestueux et élégants.
Mais j’oublie le reste.
Pop air sera donc l’exposition gonflée qui fait pshiiiit auprès des adultes mais qui fait zim, plaff, boum, ziiip ! auprès de tous les enfants. Les petits comme les grands. Si j’avais été mauvaise langue, friand de bons mots, j’aurais appelé cela l’exposition gonflante. Tout cela n’engage que moi, bien entendu. Peut-être suis-je déçu par le vide dans ma tête sur le chemin du retour.
Laurent Desjars